Librairie Pierre Saunier

Locus SolusLocus Solus Locus SolusLocus Solus Locus SolusLocus Solus Locus SolusLocus Solus

Roussel (Raymond).
Locus Solus.

Paris, Alphonse Lemerre, 1914 ; fort in-12, broché. 459 pp., 1 f. d'achevé d'imprimer au 24 octobre 1913.

Livre vendu

Édition originale.

Exemplaire sur Japon (au moins une centaine, sinon plus)

Envoi a. s. : à Jacques Leiris, très affectueusement offert au lendemain d’un jour de bataille. Raymond Roussel. 8 décembre 1922.

Jacques Leiris est le frère ainé de Pierre, Juliette (la nièce adoptée) et Michel Leiris, les enfants d’Eugène Leiris qui travailla dès l’âge de 14 ans auprès du père de l’écrivain, Eugène Roussel, dans sa charge d’agent de change avant de gérer, à la suite du décès de ce dernier, en 1894, l’importante fortune de la famille Roussel.

Raymond Roussel avait beaucoup d’affection pour Eugène Leiris qui le connut adolescent et c’est tout naturellement qu’il adopta d’une amitié filiale les enfants de celui-ci. Chaque semaine, pendant des années, Raymond Roussel se rendait chez les Leiris, au 41 rue d’Auteuil, passer des après-midi entières à les divertir de multiples jeux de sa façon ou les enchanter de lectures ou de mélodies qu’il interprétait, s’accompagnant au piano, jouant parfois tous les rôles d’une opérette ou d’un opéra entier. Tous ces détails sont bien connus par les témoignages des enfants Leiris, Michel en tête, qui en fit le sel de nombreux récits, bref, toute la fratrie Leiris eut pour l’auteur de Locus Solus une fervente et fidèle admiration – Raymond Roussel, qui tenait autant du jugement d’un enfant que celui d’un critique, en fut comblé.

Le 7 décembre 1922, eut lieu, au Théâtre Antoine, la générale de Locus Solus dans l’adaptation théâtrale de Pierre Frondaie. La pièce avait eu l’approbation de Firmin Gémier avant qu’il ne quitte la direction d’Antoine pour celle de l’Odéon. C’est son successeur, Louis Duplay, qui la fit jouer. Après la générale, représentée à 14 h, devait suivre à 20 h 30 la première – elle fut reportée au lendemain soir et fit éclat… 

Comme le notera Raymond Roussel, à la première il y eut un tumulte indescriptible. Ce fut une bataille, car cette fois, si presque toute la salle était contre moi, j’avais du moins un groupe de très chauds partisans (il s’agit des surréalistes présents dans la salle). L’affaire fit beaucoup de bruit et je fus connu du jour au lendemain. Mais, loin d’être un succès, ce fut un scandale. Car, à part le petit groupe favorable dont j’ai parlé, tout le monde était ameuté contre moi. Suivant l’expression d’un journaliste, ce fut « une levée de stylographes ». De nouveau on me traita de fou, de mystificateur ; toute la critique poussa des cris d’indignation.

Locus Solus ? Mais il me semble maintenant qu’Ubu roi n’est plus que du Casimir Delavigne, écrit ainsi Courteline. Il serait déplorable, renchérit Veber, que l’on reconstituât une bataille d’Hernani à propos d’une fantaisie lugubre, conçue dans un cabanon.

Dos un rien incurvé mais l’exemplaire ne fut-il pas lu et relu par un de ses plus enthousiastes lecteurs ? En tout cas, ça nous change un peu des exemplaires trop parfaits, ni ouverts ni coupés, aux provenances mondaines et ronflantes…