Édition originale.
Les mémoires d’un déséquilibré qui a contracté le "virus anarchiste" comme on attrape une sale grippe – une analyse pathologique en somme...
Le fait est que ça me confond. Je n’en ai pas dormi de la nuit. J’ai fait des rêves magnifiques. Je m’apparaissais manipulant des produits chimiques dans une manière de pharmacie pleine de bocaux, de flacons, d’instruments bizarres. Je pilais des poudres. Je filtrais des liquides. Je les versais dans des petits tubes de verre fragiles. J’installais gentiment tout ça dans des boîtes à sardines (...) Et tout d’un coup, tout ça partait, flambait, pétaradait, gigotait en l’air. Pierres, vitres, éclats de bois, monnaie, galons, paperasses, lambeaux de chair voltigeaient, se mêlaient, s’entrechoquaient. C’était superbe. Et puis soudain, il me sembla défaillir. Je me sentis blessé. Des gens m’empoignèrent, m’enlevèrent. Quand je repris connaissance, j’étais entouré de policiers, couché sur une civière ; et, penchée sur moi, ma mère pleurait.
Bref, après avoir dézingué à tout va (les années 1890 sont pleines de marmites) le pauvre chou fini en prison, écrit ses mémoires et se fait trancher la tête. Son manuscrit est retrouvé en 2002 par le Conservateur aux Archives des Prisons, Placide Mouton, Chevalier de la Légion Morale – tout est dit.