Librairie Pierre Saunier

Catherine MorlandCatherine Morland Catherine MorlandCatherine Morland Catherine MorlandCatherine Morland Catherine MorlandCatherine Morland

Austen (Jane).
Catherine Morland. Roman traduit de l’anglais par Félix Fénéon.

Paris, Éditions de La revue blanche, 1899 ; in-12, reliure souple à la bradel, tissu imprimé de myosotis plus roses que bleus, gardes de liserons épineux roses et or, couverture et dos conservés (AlidorGoy). 364 pp.

Livre vendu

Édition originale française.

Exemplaire du Service de Presse enrichi de cet envoi a. s. : à Jules Renard, en hommage, Félix Fénéon.

C’est en 1894 à Mazas où il avait été incarcéré après l’explosion d’une marmite anarchiste à la brasserie Foyot, que Félix Fénéon, pour tromper l’ennui, entreprit de traduire le roman de Jane Austen – le seul livre potable qu’il avait déniché dans la bibliothèque de la prison. Stuart Merrill lui fit parvenir un dictionnaire dissimulé dans une miche de pain – John Gray se chargea de relire les premiers feuillets tombés des barreaux.

Écrit en 1803, publié en 1818 un an après sa mort, Northanger Abbey est le premier roman de Jane Austen. Fénéon fit paraître sa traduction en 10 livraisons dans La revue blanche du 15 juillet au 1er décembre 1898 avec une courte présentation de Théodore Duret et une vignette de Félix Vallotton. Le volume parut en 1899.

Malgré son peu d’expérience en la matière, la traduction de Fénéon passe pour une des meilleures traductions françaises jamais réalisée de l’œuvre de Jane Austen. Fénéon dut être enchanté par l’humour pince-sans-rire de la jeune anglaise, son art de la litote et la farce parodique de l’intrigue : Catherine Morland ne se sent-elle pas piégée dans l’Abbaye de Northanger (antique demeure médiévale à l’image des obscures ruines gothiques des romans d’Anne Radcliffe) où l’a conviée le père de son amoureux qu’elle croit dangereux ? Un peu comme son traducteur enfermé à son tour. Les souterrains de Mazas sont entre les lignes, pour sûr Fénéon y aura trouvé plus qu’une échappatoire – on ne peut s’empêcher d’y entendre résonner l’écho de son irrésistible ironie. Et puis, Mazas fut démolie l’année même où parut sa traduction dans La revue blanche … Comme lui souffla un voisin de cellule,  je ne sais pas d’autre bombe, qu’un livre...

Quelques piqures d’humidité carcérale sur la couverture, bel exemplaire cependant, dans un ravissant tissu anglais … évidemment rapporté de Bath.

Un envoi de Fénéon au caustique Renard est l’attrait ultime de cet exemplaire.

Quelques marques de lecture, au crayon bleu, par l’auteur de Poil de Carotte.

Jean Paulhan fit rééditer la traduction de Fénéon chez Gallimard en 1946 – depuis, elle est de toutes les collections.