Édition originale tirée à 51 exemplaires seulement sur Whatman, numérotés et paraphés par l’auteur.
Double envoi a. s. : à Oscar Méténier (dont je voudrais bien avoir les derniers volumes) Son très reconnaissant et ami, Jean Ajalbert
Et bien plus tard : à Chaffiol-Debillemont, ces vers qui reviennent de loin - du temps où il y avait des fortifs ! Cordialement Jean Ajalbert 1938
Avocat, auteur dramatique, romancier, canoteur, explorateur ou académicien Goncourt, Ajalbert débuta sa carrière littéraire par trois recueils de “vers impressionnistes” : Sur le vif, 1886, Paysages de femmes, 1887 (frontispice de Raffaëlli) et le présent Sur les talus.
Ce dernier recueil est orné d’une étonnante lithographie circulaire de Paul Signac tirée sur japon mince. Figure emblématique, celle-ci évoque l’atmosphère particulière et le matériel cher à notre poète : ciels fuligineux, arbres en balais, palissades, réverbères, banc… des éléments de décors maintes fois célébrés dans les pérégrinations urbaines et suburbaines d’Ajalbert, évoquant à la manière d’un peintre, les barrières parisiennes et les paysages de banlieue, coins d’usine de Saint-Ouen, bords pelés de la Seine à Asnières, terrains vagues de Levallois-Perret, de Clichy la Garenne, de Pantin… bref, des décors habituellement dédaignés par la Muse et dont Ajalbert réussira à rendre poétiquement les aspects fugitifs si chers à l’impressionnisme.
Les peintres modernes vous ont donné le sens de la couleur, de l’arrangement. Vous avez écrit comme ils peignent lui écrit Robert Caze (préface à Sur le vif). Rappelons d’ailleurs que c’est dans le modeste logis de ce dernier, au 13 de la rue Condorcet, logis où devait se formuler le pointillisme et s’épanouir le néo-impressionnisme et où se retrouvaient chaque lundi, entre 1884 et 1886, écrivains et jeunes littérateurs (Huysmans, Hennique, Alexis, Régnier, Vielé-Griffin, Adam, Moréas, Laforgue, Darzens, Fénéon, Vignier, Vidal, Trézenik, Kahn…) qu’Ajalbert rencontra les peintres modernes qui devaient tant l’influencer, les Dubois-Pillet, Raffaëlli, Lucien et Camille Pissarro, Luce, Guillaumin, Signac, Seurat et Angrand.
Avec ces trois derniers, Ajalbert fréquenta le Moulin de la Galette, le Gambrinus, le Progrès – bistrot ouvrier “ anar” au coin de l’avenue de Villiers et de la rue Brémontier – et La Grande Jatte qu’ils rejoignaient à bord du cat-boat de Signac, Le Tub. Longtemps après les talus, c’est également à bord d’un sloop à tape-cul, Le Mage, que Signac et Ajalbert poursuivront leur amitié, concourant avec succès aux régates à la voile de Portrieux.
Bel exemplaire, rare et précieux.